j'ai décidé de vivre (5) ...

(La réalité en pleine tronche!)
[...] Lorsqu'on me coupe la jambe gauche au-dessous du genou, mon état de conscience m'autorise à donner mon accord; je le donne. Au point où j'en suis, cela ne peut plus changer grand-chose...
Le désespoir, l'incessante litanie de mon malheur sont toujours là. Ils se teintent désormais d'une nuance supplémentaire. La colère, la révolte, les "POURQUOI?" font leur apparition. Des "pourquoi" sans "parce que", sans réponses ...
Pourquoi moi ? Pourquoi à ce point-là? Pourquoi est ce que je n'y suis pas resté? Qu'ai-je fait pour mériter cela? Du plus profond de mon être, j'appelle la mort et je lui demande pardon d'avoir lutté contre elle le jour de l'accident, je lui demande pardon d'avoir refusé de la suivre.
J'oscille constamment entre la révolte et l'abattement, la solitude la plus indépassable. Je suis incapable d'aucune analyse sensée. Les sensations, les humeurs me portent et décident pour moi.
Aujourd'hui, je sais qu'il s'agissait d'une étape, et que cette étape m'a ramené à la vie. Elle aurait pu aussi bien sanctionner ma folie ou mon suicide.
Je la conçois désormais comme l'élément d'une progression. Heureusement , le temps a fait son oeuvre.
Extrait du livre de Philippe
Croizon: "J'ai décidé de vivre"
Jean Claude Gawsewitch Editeur
Publié avec l'autorisation de l'auteur